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Si les feuilles meurent...
30 novembre 2007

- Nouvelle -


Écrase-monde

 

 

Je me tenais dans le coin de la porte, bleue, et me demandais comment on en était arrivé là.

Je n’étais pas là.

TOUT semblait se confondre dans la vapeur mais je n’étais pas

là.

L’autre frappait dans mon crâne et ne demandait qu’à sortir ; j’empoignais alors une grosse paire de ciseaux et entrepris de labourer mes bras maigrichons.

Le rouge gicla.

Le rouge giclait mais je n’étais toujours pas là. 

Le bleu me comprimait les tempes et la théière se mit à hurler.

Qu’est ce qu’il avait bien pu se produire pour que toute la vie me crache à la gueule et ricane tandis que je me demandais où je me trouvais.

La pièce souriait…

La pièce souriait, remplie de toutes ces choses qui vous font perdre l’esprit, et je ne savais pourquoi ces grenouilles ne cessaient d’aboyer contre leurs misérables existences,

et la mienne.

Merde !

Bouchon, ciel noir, crache-merde,

écrase-monde

C’était comme si tout ce que j’avais désiré avait doucement glissé, comme pris dans la boue.

Je me retrouvais seul.

Avec jean-luc,

seul,

seul avec jean-luc.

 

 – Rentres chez toi, murmurai-je.

 

Pas de réponse.

Seul.

Je me plus alors à penser qu’il avait définitivement quitté les lieux et que j’étais enfin.

Être

Seul

Libre

Je pouvais compter les mouches qui partaient en pleurant et je leur offris un peu de chaleur.

La théière hurla. Puis jean-luc :

 

– Ne penses pas trop vite, tu espères.

 

Un sursaut, une pulsation, un remord, un piège qui me tenait comme une partition morte.

 

– Vas-t-en ! Mais casses toi bordel! Je ne suis pas là, alors ça ne sert à rien.

Pars !

– Bla Bla bla...

 

Le renard m’observait d’un œil mort et me renvoyait l’image de toute cette horreur.

C’était jean-luc qui avait eu l’idée de l’attraper,

-un renard-

de l’emmener dans la piaule, et de le faire boire tant qu’un simple mortel aurait décidé d’aller voir si

 tout était normal ici bas

 dans mon ventre tendu

 prêt à rompre

 et

 à relâcher toute

 la misère du ciel.

 

Ciel noir

  écrase-monde

 

C’est lorsque que le renard parla que je me dit que finalement je me tenais peut-être effectivement aux portes de la folie.

Fumée, fureur

 

– Belle plante, dit-il.

 

Il parlait allemand mais je comprenais. Quand un renard parle, on comprend toujours.

 

 – Tues le ! Buttes cet enfoiré sournois, chuchota jean luc.

 

Je regardais tour à tour

jean-luc

le renard

mon reflet

et la fenêtre qui souriait et me tendait ses tous petits bras jaunes.

Le sang colorait

tout

et je ne comprenais plus

rien.

Peut-être aurai-je du finir mon verre, ou prêtre bien que j’aurais du faire comme si de rien n’était, et sortir, et sortir

et sortir

et sortir dans la rue et trouver une fille gentille, normale, qui m’aurait prit dans ses bras de poulets et bercé jusqu’à la prochaine chance.

La fenêtre s’ouvrit brutalement et me sourit a nouveau.

Y’avait des tas de bouteilles qui tombaient du ciel et menaçaient d’éclater en contrebas.

Je pris mon élan,

fis taire jean-luc qui pleurait,

et franchis le ciel.

écrase-monde

 

L’éclat des bouteilles se rapprochait tandis que je baisais Mme la Mort et lui laissais un gros suçon, pour la prochaine, si il y en aurait une.

Le trottoir me faisait de grands gestes et je sus que jean-luc était partit.

Quand mon corps embrassa le bitume, je sentis tout mon être se diviser, s’écarteler, et réclamer justice ; j’avais agi par pulsion et mon corps n’était pas enchanté.

Loin de mon crâne éclaté, ma langue lapait le sol imbibé de vin.

Un bras éparpillé mendiait ce qu’il lui été dû et réussi a rattraper une bouteille avant qu’elle ne se fracasse.

Il cherchait désespérément ma tête qui roulait sur la route.

Un individu passa, crachat sa haine et mangea ce qu’il restait de ma vie.

Le cri fut assourdissant.

 

Quand je me réveillai, je sentis chaque parcelle de ma peau hérissée, tremblant de froid et cherchant désespérément à échapper à la chaleur qui m’irradiait.

Le drap était trempé, comme si la vague infecte de ma colère s’était écrasée sur mon lit.

Je fus très étonné d’entendre jean-luc.

L’infirmier glissa une gélule

dans ma bouche encimentée

et je glissai à nouveau,

prêt a subir les cauchemars de mes nuits.

L’effet de la drogue ne tarda pas à s’entendre,

la voix de jean-luc s’essoufflait peu à peu.

Je pris une longue inspiration,

le calme était

là.

La folie reprendrait demain, jean-luc avec, à me marteler le crâne, à susurrer, à mendier, et je ne pourrai rien faire sinon

attendre

la gélule.

 

J’aurais voulu être américain.

Faire un carton.

Armé d’un fusil de chasse.

Me livrer à la police

et recevoir la libération.

Quelques centaines de kilowatts à travers le corps.

Et laisser jean-luc loin derrière moi, le quitter pour toujours.

Goûter enfin

La paix

Le silence

Le vide

Mais voilà, j’étais sanglé dans cet ersatz de lit,

 crache-merde

cellule vingt-huit

 écrase-monde

et

personne

ne se souciait

si je voulais

ou non

de

ma

vie.

 

 

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